Cuvée GENESIS
Genesis aura tenu le haut du pavé du rock progressif entre 1971 et 1974. Nous nous bornerons dans cet article à évoquer principalement la période Peter Gabriel, qui reste la plus riche...
En Mars 1969 sort leur premier disque From Genesis To Revelation, mais sans nom de groupe. Car ici, Genesis (Gabriel, Banks, Rutherford, Phillips et Silver) ne s'appelle pas encore Genesis. De plus, à cause d'une très mauvaise communication, l'album est classé chez les disquaires dans la catégorie musique religieuse ! Ce fut un flop total, on s'en doute, avec seulement quelques centaines de copies vendues à l'époque.
Oui, mais la musique?
Rien, absolument rien ne laisse présager à ce moment-là du monstre que va devenir Genesis à l'écoute de ce disque que l'on peut qualifier de "document émouvant". Les musiciens ont à peine vingt ans, et la voix fluette de Peter Gabriel est presque méconnaissable. L'enregistrement un peu gauche, les morceaux sont enchaînés sans interruption, mais maladroitement, avec des sortes d'interludes qui n'en sont pas, bref, c'est plutôt raté, sauf que...
Sauf que le charme des années 60 opère bel et bien, avec des morceaux de pop sucrée tels que Where The Sour Turns To Sweet ou encore Fireside Song que des violons rendent encore plus mièvres qu'ils ne sont à la base.
Mais en 1970, la métamorphose de Genesis (qui du coup a trouvé son nom) est renversante, comme en témoigne Trespass, qui est beaucoup plus sérieux et professionnel. Peter Gabriel a une voix assurée, rauque, tandis que les morceaux sont assez longs et de structure tarabiscotée. Tous les éléments qui feront plus tard le Genesis que l'on connaît sont présents. L'ensemble manque juste de maturité et d'une petite étincelle créative supplémentaire.
1971 voit l'arrivée d'un certain Phil Collins à la batterie en remplacement de John Silver, et de Steve Hackett à la guitare en remplacement de Antony Phillips. La mayonnaise prend de suite sur l'album Nursery Cryme qui contient le chef d'oeuvre The Musical Box, et d'autres titres géniaux tels que Seven Stones ou encore The Fountain Of Salmacis. Mais le meilleur reste encore à venir...
Foxtrot (cf photo plus haut) reste un sommet du groupe. Nous sommes en 1972, et la bande à Gabriel est au sommet de sa forme.
L'album s'ouvre sur le mellotron quelque peu inquiétant du superbe Watchers Of The Skies pour laisser place à la mélodie simple et efficace de Time Table. Ensuite, Get 'Em Out By Friday surprend par ses rebondissements incessants tandis que Can Utility And The Coastliners fait entendre le large spectre vocal de Gabriel.
Horizons, un très bel instrumental, précède le plus long morceau de toute la carrière de Genesis: l'éléphantesque Supper's Ready: 23 minutes follles, avec des thèmes très différents et pourtant superbement imbriqués les uns dans les autres.
Drôle de pièce tout de même, où il est question d'anges, de démons, de fermes délirantes, de batailles... Je ne suis pas certain d'avoir tout pigé, mais y-a-t'il quelque chose à comprendre d'ailleurs?
Bref, revenons à nos moutons, car il va falloir que l'inspiration soit au rendez-vous afin d'accoucher du digne successeur de Foxtrot.
En 1973 sort Selling England By The Pound (photo ci-dessous), et aujourd'hui encore, la critique, les aficionados sont quasi unanimes sur le sujet: Nous tenons-là le meilleur album de Genesis. Ou pour être plus prudents, nous dirons qu'il est au moins aussi bon que Foxtrot et qu'il est inutile de chercher Midi à 14 heures, car Genesis, c'est ici et maintenant.
Les éléments s'installent avec une facilité déconcertante sur Dancing With The Moonlit Knight dont Gabriel entonne les premières notes a-cappella, rejoint par ses acolytes avec beaucoup de délicatesse pour partir dans une envolée très réussie. Chaque note fait mouche.
I Know What I Like, le deuxième morceau sera pour eux la porte d'entrée dans les charts Un tube donc, mais élégant, et qui ne cède pas à la facilité pour autant.
.Et puis, et puis, il y a les 9 minutes de Firth Of Fifth, peut-être le sommet cet l'album, avec sa superbe intro au piano et sa progression qui lui fait suite. Une construction de haut vol! Aux dires de certains, il s'agirait là du meilleur morceau que le groupe n'ait jamais écrit...
Juste après, par contre, More Fool Me, chanté par Collins, nous fait redescendre de 10 étages tant le titre est court et simple... ce sera la seule ombre au tableau de ce disque, avec peut-être quelques longueurs dont on aurait pu se passer sur The Battle Of Epping Forest.
Signalons enfin le deuxième plus grand titre de l'opus qui est The Cinema Show, magnifique, qui restera également parmi les titres les plus mémorables du groupe.
Voilà bien une oeuvre que tout(e) amateur(rice) de prog se doit d'avoir écouté au moins 50 fois dans sa vie.
La suite sera un peu moins reluisante, avec les premières tensions qui apparaitront entre Gabriel et les autres membres du groupe.
C'est dans ce contexte que nait l'ambitieux The Lamb Lies Down On Broadway en 1974. Moins facile d'accès mais néanmoins très bon, ce double album peut s'apparenter au fameux The Wall des Pink Floyd: Il s'agit ici d'un personnage (Raël) dont la folle histoire est narrée au travers de 23 titres de durée relativement courte, au style plus direct, plus rock. C'est hélas ici que s'achève la période Peter Gabriel, et rien ne sera plus jamais comme avant...
C'est donc Phil Collins qui a la lourde charge de remplacer Gabriel au chant. Et quand sort A trick Of The Trail en 1976, la surprise est plutôt bonne tant le disque est réussi, et tant la voix de Collins quoique fluette est déjà familière aux auditeurs. Une transition tout en douceur qui dissipe les craintes légitimes des fans de la première heure.
Les choses se gâtent quelque peu sur Wind And Wuthering paru la même année, et surtout sur l'ignoble And Then There Were Three, album indigne qui voit le départ du guitariste Steve Hackett. Cette fois-ci, rien ne va plus... Il va falloir stopper l'aventure ou prendre une nouvelle direction.
Le groupe abandonnera donc le progressif pour se consacrer presque exclusivement à la pop, sans quoi il n'existerait plus depuis longtemps.
Même si l'âme de Genesis s'en est allée depuis le milieu des années 70, il restera de cette dernière période des tubes imparables comme Abacab, Mama, That's All, Land Of Confusion ou encore No Son Of Mine, qui n'en finissent pas d'inonder la bande FM et qui ont résonné des centaines de fois dans des stades bondés.
Qui l'eut cru? C'est la carrière solo prolifique de Phil Collins qui a grandement contribué à rendre Genesis populaire !
Tant mieux, dans le fond.
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